Aujourd’hui, je vous emmène à la rencontre de Benjamin, un baroudeur qui a toujours eu pour objectif de voyager sans argent pour de nombreuses raisons. Récit intéressant, et, surtout, conseils à (ap)prendre d’urgence!
Voyager sans argent
En janvier 2010, nous sommes partis des Pays-Bas à trois, un allemand, un italien et moi-même pour tenter de rejoindre le Mexique sans un sou en poche. Au départ, ce n’était qu’un pari écologique, nous voulions démontrer que voyager en minimisant son empreinte carbone était possible. Ainsi, nous avons acheté des sacs à dos solaires, un panneau solaire pliable, un filtre à eau très puissant, nous avons pris quelques vêtements, un sac de couchage chacun, pas de tente et nous sommes mis en route avec la ferme intention de ne pas utiliser un centime. Seules exceptions, les Visas ou les urgences médicales. Nous avions une carte bancaire dissimulée dans mon sac.
Dès le début de notre voyage, nous avons compris que voyager sans argent allait bien au-delà du pari écologique. Au fur et à mesure, cette épopée se transforma en véritable voyage initiatique… une aventure pour découvrir le monde avec un autre regard, pour apprendre à recevoir, et donc à donner, à lâcher prise et à accepter la réalité telle qu’elle nous apparaissait dans l’instant présent. Je vais vous donner quelques trucs et astuces pour que vous puissiez vous aussi vous lancer dans une telle aventure.
1. Première condition pour voyager sans argent : le vouloir !
Voyager sans un sou n’est pas si difficile que ça, mais le moral est mis à rude épreuve. Il faut marcher souvent longuement, attendre parfois des heures sur le bord de la route, dormir dehors (et oui, l’hospitalité est une denrée rare de nos jours) et aussi, certains jours, se contenter de pains de la veille.
D’autres moments sont épiques, on peut se faire inviter dans une ferme écologique, dormir dans un hôtel trois-étoiles, se gaver de fruits, découvrir des plats typiques fait maisons, traverser la mer en voilier, etc…
Beaucoup de hauts et de bas, et donc, la nécessité d’être assez solide dans sa tête, de vouloir vivre cette expérience pour en profiter pleinement.
2. Il faut aussi du temps…
Pas la peine de fixer une date limite. Au départ, nous voulions arriver fin mars au Mexique et revenir en juillet. Nous étions partis en janvier. Nous sommes arrivés en décembre et je suis rentré 3 ans plus tard ! Le temps est nécessaire pour ne pas stresser, savourer les moments d’attente qui sont riches d’enseignements. Nous avons attendu une fois 5 jours sur une station-service et une autre fois 1 mois et demi avant de trouver un bateau sur l’île de Las Palmas.
3. Le déplacement
Presque la partie la plus simple. L’auto-stop est largement pratiqué et il est assez facile de se faire prendre en stop. En Europe, seule l’Espagne et l’Italie sont des contrées un peu plus difficiles à parcourir, mais on le fait quand même, souvent grâce à des étrangers. Nous avions traversé l’Espagne grâce à deux Roumains, un Ukrainien, une Française et un Argentin! Quelques petits trucs à prendre en compte :
— Ne pas faire de stop la nuit…ça fatigue et c’est plus risqué. Autant bien se reposer et commencer tout frais le lendemain matin.
— Préparer de la nourriture avant de partir pour ne pas être affamé et donc de mauvaise humeur. 🙂
— Ne pas hésiter à marcher jusqu’aux sorties des villes pour limiter les temps d’attente.
— Suivre son instinct, si vous sentez que ce type là ou un autre n’est pas cool, refusez ! Si vous êtes une fille, une vigilance extra est préférable. Prétextez que vous avez promis à votre mère de ne monter qu’avec des femmes par exemple.
— Faire confiance, il y a toujours quelqu’un qui s’arrêtera et si vous souriez, ça ira plus vite.
4. La nourriture: Le plus dur n’est pas d’en trouver, mais de la demander.
Dans nos sociétés ultras individualistes, nous avons oublié de demander et, surtout, nous n’aimons pas recevoir ni quémander. C’est tout un déconditionnement et un nouvel apprentissage qu’il faut faire. Au début, pour vaincre la gêne, il est utile de préparer un petit discours, de préciser que vous faites une expérience de vie sans argent et que c’est pour ça que vous demandez les invendus…ensuite, ça aide énormément de découvrir qu’il y a effectivement des kilos et des kilos de nourritures qui se jettent à chaque instant, partout. Il y a les conteneurs de supermarché, de boulangeries…de véritables mines d’or qui ne sont malheureusement pas toujours accessibles. Le plus sûr est de demander aux patrons ou aux managers. Privilégier les établissements non franchisés, les boulangeries artisanales, les restaurants.
Demandez le patron ou le responsable.
Demander est un exercice plus fatiguant que ce que l’on peut imaginer. Il faut économiser sa salive surtout si les refus sont nombreux, les « non » sont quand même très courants (plus en Europe qu’en Amérique Latine ou en Afrique). Ne vous lancez pas dans l’explication de votre « quête » à tout-va au risque de devoir le répéter à l’employé, au sous-manager et au manager avant qu’il vous dise que le patron n’est pas là et que c’est lui qui prend les décisions.
— Raconter votre histoire, démontrez que vous n’êtes pas juste un mendiant feignant, mais que vous avez un projet, que vous avez une idéologie derrière votre démarche. Ça aide.
— Souriez…bien entendu. Comme avec le stop, ne vous énervez pas si le patron refuse, c’est son droit. Au pire, attendez la fermeture et vérifier le conteneur.
— Vérifiez bien les horaires de fermeture et convenez avec le patron de revenir pour les restes. Il est préférable de faire la tournée des commerces avant le rush vers 11 heures du matin ou 18h du soir et revenir ensuite pour les restes. Si vous arrivez trop tard le soir, le patron est souvent parti.
Pour les supermarchés, renseignez-vous sur l’heure de sortie des poubelles et soyez à l’affût.
De manière générale, il est important de comprendre qu’il y a énormément de gaspillage et qu’il y en a pour vous et que c’est légitime de le demander.
Offrir ses services est une option, mais il faut alors envisager de rester quelques jours. Des petites pauses pendant le voyage sont conseillées. Voir avec les auberges de jeunesse, les petits restaurants ou les fermes.
5. Le logement
Nous sommes partis sans tente, mais la tente peut être très utile. Sans, il faut ajouter aux demandes quotidiennes de nourriture, les demandes de logement. Les hôtels et les auberges de jeunesse peuvent parfois accueillir en l’échange d’un service ou pas. Encore une fois, évitez les franchises. Dans les lieux touristiques, les hôtels ont des buffets et il nous est arrivé de pouvoir se servir à la fin et, en prime, de dormir dans la cour de l’hôtel (à l’abri donc).
De manière générale, il est plus simple et plus pratique de juste dormir dehors. Moins fatiguant que de chercher à trouver un lieu. Quand il pleut, c’est plus compliqué, il y a les couloirs dans les villes, les cages d’escaliers (il faut y rentrer tard et s’y lever tôt), ou les ponts à la campagne.
Là encore, le plus dur est de demander. Il y a beaucoup de gens généreux et hospitaliers, mais ils ont peur… Après un premier contact, une fois qu’ils ont compris que nous ne sommes pas des délinquants ou des vagabonds, ils ont tendance à se détendre et les portes s’ouvrent.
Après un premier contact, une fois qu’ils ont compris que nous ne sommes pas des délinquants ou des vagabonds, ils ont tendance à se détendre et les portes s’ouvrent.
Pour se sentir en sécurité, il est bon de demander aux hôpitaux, aux pompiers (souvent très accueillants), à la croix rouge et autres organismes… Éviter la police, ils ont tendance à créer plus de problèmes qu’autre chose. Ces organismes pourront souvent vous laisser au moins dormir dans l’enceinte, et parfois, il auront des chambres ou des matelas. Surtout en Amérique Latine.
Les squats sont aussi une bonne option mais il n’y en a pas partout…dès que vous entrez dans une ville, soyez à l’affût des gens aux looks alternatifs…
Couchsurfing ou Bewelcome sont des options mais il faut en général s’organiser à l’avance, et sans argent c’est plus dur.
6. La Santé
Chacun ses habitudes. Nous n’avions rien prévu mais pas d’alcool et un régime strictement végétarien pallie certains manques de précautions. Un filtre à eau est nécessaire en dehors de l’Union Européenne, ou alors il faut demander de l’eau dans les bars et restaurants qui ont des filtres en général. Bien laver les légumes, ne pas manger quelque chose qui sent mauvais, éviter les produits laitiers périmés…
De manière générale, sans argent, l’hygiène est importante pour ne pas avoir à débourser en rentrant chez soi, ou même se faire expatrier. La fatigue et le stress sont deux incubateurs à maladie et donc à éviter au maximum!
En Europe, les portes sont très fermées, et il faut chercher les squats et les alternatifs pour trouver du soutien. Une fois sorti du Vieux Continent, tout est plus simple, les pays musulmans sont hospitaliers par nature et tout le continent américain aussi (même les États-uniens nous sont apparus bien plus hospitaliers que les Français!).
Le plus dur au final, est d’accepter son statut de «sans argent». Beaucoup auront tendance à nous qualifier de profiteurs…jusqu’à ce qu’ils comprennent la démarche et la soutiennent. Tout est dans l’attitude. Voyager sans argent n’est pas un truc pour ne pas dépenser et valdinguer gratuitement, c’est une expérience enrichissante pour découvrir le monde autrement, pour aller à la rencontre des autres (vu que nous demandons tout, tout le temps, à tout le monde, nous rencontrons beaucoup de monde), apprendre à lâcher prise, à prendre ce qui vient, ce qui nous est donné.
Au terme de mon voyage, j’ai eu l’impression de n’avoir appris qu’une chose réellement: recevoir. En apprenant à recevoir, j’ai appris la gratitude, et donc, l’amour, la compassion…et depuis, je n’ai qu’une envie : donner à mon tour ! Bon vent 🙂
Pour les intéressés et pour tous ceux qui souhaitent découvrir cette belle histoire, un ebook gratuit est disponible sur le blog de Benjamin 🙂